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Un élégant château gothique
Soumis par Jean-Louis Marrou le ven, 07/12/2012 - 12:00

Oublié le donjon où croupissaient d’illustres prisonniers. Vive la tour de la bibliothèque ouverte aux intello ! Avec Charles V, le Louvre perd sa fonction défensive et accède au rang de résidence royale.
Sous le règne de Charles V (1364-1380), le Louvre se transforme en résidence royale. La première partie de la Guerre de cent ans se termine. La prospérité revient. Paris s’agrandit. Une nouvelle enceinte (un fossé et un simple talus de terre), repousse les limites de la ville au delà du Louvre.
> Vous êtes toujours dans le quart Sud-Ouest de la Cour Carrée
> Profitez d’un des bancs de pierre, pour découvrir à votre aise l’histoire du château gothique.
> A moins que vous ne préfériez vous assoir sur le rebord du bassin au centre de la cour.
La nouvelle muraille construite en 1360 longe le Louvre à la hauteur des actuels guichets, se termine à la hauteur de la Seine par la tour du bois, puis longe la rivière jusqu’à la muraille de Philippe Auguste, où elle rejoint la tour du coin. Du coup, le château fort de Philippe Auguste, englobé dans l’agglomération, se trouve dépouillé de sa fonction militaire face à un ennemi extérieur (le plus souvent anglais).
Pour autant le Louvre ne perd pas toute utilité défensive. Charles V entend bien l’utiliser, le cas échéant, pour se protéger d’une éventuelle insurrection du peuple parisien. Dans sa jeunesse, alors qu’il était encore dauphin, il fut témoin, à la Conciergerie, de l’assassinat de deux proches conseillers de son père. Le souvenir de la révolte populaire conduite par le prévôt des marchands Etienne Marcel incite le roi à la plus grande prudence.
Nouvelle résidence royale
Charles V déserte la Conciergerie. Il vit entre l’Hôtel Saint Pol, près du Marais et le Château de Vincennes, à l’Est de la ville : deux nouvelles résidences royales, construites par l’architecte Raymond du Temple. Quant au Louvre, il va devenir une sorte de havre protecteur, où Charles V se retire régulièrement pour le plaisir. Il va, de ce fait, subir une profonde transformation.
La triste forteresse, dont le donjon servait de temps à autre de prison, se métamorphose en un joli château gothique (photo ci-contre). Les lourdes murailles se dotent d’élégantes fenêtre à meneau. Les tours se couvrent de toits d’ardoise et de clochetons. Deux peintures célèbres du 15ème siècle, conservées au Louvre, permettent de découvrir l’élégance de ce château gothique : La Crucifixion du Parlement de Paris (aile Richelieu, 2ème étage, salle 6) et La Pietà du maître de Saint-Germain-des-prés (aile Richelieu, 2ème étage, salle 7).
Dans ce grand mouvement de transformation, les ailes Sud et Ouest, qui abritent les salles de réception et les appartement du roi, sont restaurées; et les ailes Est et Nord dotées de nouveaux bâtiments. Mais surtout, Raymond du Temple, considéré comme un des tous premiers architectes des bâtiments royaux, va doter le Louvre d’une innovation majeure : la Grande Vis (photo ci-contre : base de l'escalier).
«L’architecteur» (expression de Christine de Pisan) construit à l’intérieur de la cour, au milieu du flanc Nord, un grand escalier hélicoïdal de 83 marches dans une tour de 20 mètres de haut. Puis, il relie la Grande Vis au vieux donjon de Philippe Auguste par une galerie couverte.
Le salon d'un des premiers rois intello
Enfin, à cette époque le Louvre hérite d’une toute nouvelle et illustre fonction. Il devient le siège d’une grande bibliothèque royale. Charles V est sans doute un des premiers rois intellectuels. Sa santé fragile le pousse en effet à se réfugier dans les activités pieuses et dans les livres. Construite à l’angle des flancs Nord et Ouest (l’emplacement de l’actuel Tour de l’horloge) la Tour de la librairie abritait quelques 973 ouvrages : livres religieux et théologiques, traités des philosophes antiques, récits de voyages, traités scientifiques...
Cette tour, dont l’un des trois étages fut doté, comme le donjon du château de Vincennes (toujours visible), de plafonds et de panneaux muraux en bois précieux, était incontestablement un lieu propice à l’étude, à la réflexion et à la discussion. Charles V aimait y séjourner et y retrouver les intellectuels de son temps, notamment une certaine Christine de Pisan. Cette femme de lettre, fille d’un proche conseiller du roi, fut, dit-on l’une des premières écrivaines françaises à avoir vécu de sa plume.
Ainsi, le Louvre, métamorphosé en résidence royale, s’apprêtait-il à devenir le centre de la vie intellectuelle et culturelle du royaume.
Le Louvre 810 ans d'histoire pas à pas