Un palais classique au bord de l'eau

La décision de reconstruire l’aile méridionale cinq ans seulement après son achèvement ne fut peut être pas une simple lubie de Louis XIV. Elle permit d’affirmer le nouveau style classique. Et fit plus que jamais du Louvre un palais du bord de l’eau.

 

 

Pas de doute, vers 1667, la Colonnade de Perrault a provoqué un cataclysme sur le flanc Sud du Louvre : plus haute d’un demi étage que le palais Renaissance, elle est aussi plus large de 15 mètres vers la Seine ! 

 


Résultat : l’aile méridionale conçue cinq ans plus tôt par Louis Le Vau, et tout juste construite, est remise en cause. Les architectes des bâtiments du roi sont priés de recréer, du côté du fleuve, une nouvelle façade, alignée sur le bâtiment oriental.

 

 

> Longez la colonnade vers le Sud, en vous dirigeant vers la Seine.

 

> Tournez à droite, au coin du Louvre. Et observez la façade méridionale.

 


Pourquoi a-t-on souhaité recréer du côté du fleuve une façade parfaitement linéaire ? Sans doute y avait-il une raison architecturale : affirmer le style classique nouvellement imaginé. Mais il y avait aussi une raison pratique : agrandir, côté Seine, des appartements que le roi jugeait trop étroits. 

 


Enfin, il y avait peut-être une raison d’urbanisme. Le pont Saint-Anne à l’Ouest, le Pont Neuf à l’Est, le Louvre au Nord et le futur Collège des Quatre Nations au Sud dessinaient un beau et vaste bassin fluvial. 

 


Le Louvre, palais du bord de l’eau, devenait le lieu idéal pour organiser et admirer des fêtes nautiques. Ce que Louis XIV ne manqua pas de faire. Pas de doute, une façade monumentale de style classique ouvrant sur le bassin faisait sens. On peut encore le constater aujourd’hui malgré la circulation. 

 


 

Une formidable tribune face à la Seine


Bien que le bâtiment méridional soit un demi étage plus élevé que le Louvre de Lescot, on y retrouve la hiérarchie entre le premier étage et l’attique. Particulièrement élevé, l’étage noble est magnifié par de hautes fenêtres à frontons, et, au milieu du pavillon central,  par un grand balcon, qui offrait à la famille royale une formidable tribune face au bassin fluvial.

 

La décision de reconstruire l’aile méridionale fut prise en 1668. Mais, elle ne se traduisit, sous le règne de Louis XIV, que par l’édification de la façade, 15 mètres devant le bâtiment que Le Vau avait édifié ! Juste la façade et un vide de 15 mètres !

 

Et pour cause ! Le chantier de Versailles, qui venait d’être lancé,  allait peu à peu mobiliser toute l’attention du roi et toutes l’énergie de ses bâtisseurs. En 1678, les travaux du Louvre furent arrêtés. Ni l’aile orientale, ni l’aile méridionale n’étaient alors achevées. 

 

Avec l’installation définitive de la cour à Versailles en 1682, ce chantier inachevé n’allait pas tarder à abriter le plus grand squat de l’histoire de Paris. 

 



> Longez la façade méridionale, vers l’Ouest, en direction du porche Sud que vous avez emprunté au début de la visite.

 

> Arrêtez vous quelques instants à la hauteur du porche Sud et du Pont des Arts.

 

> Observez devant vous, la petite galerie, perpendiculaire à la Seine, et, devant lui, le jardin de l’infante.

 

 

Une dernière raison avait pu conduire les architectes à repenser la façade méridionale : le réaménagement, quelques années plus tôt de la Petite galerie. En 1661,  un incendie avait ravagé la grande salle au premier étage. Louis Le Vau en profita, vers 1664, pour reconcevoir toute cette partie du palais, qui offrait une vue imprenable sur la Seine et l’île de la Cité. 

 



Il recréa une nouvelle salle de réception, richement décorée par Charles Le Brun, la Galerie d’Apollon, et la fit communiquer vers la Galerie du bord de l’eau par le Grand Salon (l’actuel Salon Carré).

 

 

 

Ici furent inventés les "salons"


Une fois la cour installée à Versailles, tous ces nouveaux espaces ne se transformèrent pas en squat. Certains d’entre eux, trouvèrent un nouvel usage. On y installa les académies royales nouvellement créées, et en particulier l’Académie royale de peinture et de sculpture, fondée en 1648 à la demande de Mazarin et de Charles Le Brun.

 

Pour intégrer cette institution, les artistes devaient présenter un projet d’oeuvre. Ensuite, une fois admis, ils pouvaient l’exécuter. À partir de 1699, l’Académie royale de peinture et de sculpture prit l’habitude d’exposer les oeuvres ainsi réalisées : l'événement avait lieu, chaque année, le 25 août, jour de la Saint-Louis, dans le Grand Salon 


Cette tradition est à l’origine des «salons». Elle a, tout à la fois, permis d’inventer le mot et l’événement qu’il désigne : une exposition d’art contemporain. Ainsi, sent-on déjà s’affirmer la vocation artistique du Louvre.


 

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